L’administration de la Mission française épinglée par le ministère français du Budget

L’administration de la Mission française épinglée par le ministère français du Budget

Les associations des parents d’élèves auraient-elles finalement raison de dénoncer les inexactitudes et les approximations de la gestion financière de l’AEFE ? Probablement, car cette gestion est épinglée par un courrier du ministère français du Budget, à Bercy, adressé à la Directrice de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, et dont PanoraPost s’est procuré une copie. De plus, un autre courrier a été adressé par l’agent comptable du lycée Descartes aux parents d’élèves, ouvrant la possibilité d’un paiement directement en France pour les prestations effectuées au Maroc.

Bercy conteste la gestion de l’AEFE

« J’ai l’honneur de vous notifier l’approbation expresse du budget initial (…). J’exprime toutefois deux réserves quant à la conformité des documents budgétaires au décret GBCP (gestion budgétaire et comptable publique) » écrit le directeur du Budget dans ce courrier. Quelles sont ces deux réserves ?

1/ Le non-respect du principe de sincérité, du fait que la logique d’agrégation des masses budgétaires et comptables génère un « gonflement artificiel des flux financiers entre les services centraux et les établissements en gestion directe ». De fait, l’activité économique réelle de l’établissement n’est pas fidèlement rendue en raison de la « complexification de la lecture des documents budgétaires de l’agence ».

Le « principe de sincérité » est exprimé à l’article 53 du décret GBCP, qui dispose que « la comptabilité publique doit permettre de « saisir, de classer, d'enregistrer et de contrôler les données des opérations budgétaires, comptables et de trésorerie afin d'établir des comptes réguliers et sincères, (ainsi que) de présenter des états financiers reflétant une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et du résultat à la date de clôture de l'exercice ».

2/ Le non-respect du principe de limitativité des crédits, énoncé en l’article 178 du même décret GBCP, en raison de  l’existence de doubles flux internes.

L’opacité de la gestion de certains établissements de l’AEFE au Maroc – dénoncée par les associations –  proviendrait donc d’écritures comptables jusque-là décriées par ces associations, qui se voient donc confortées dans leur contestation de cette gestion par le courrier de Bercy adressé à l’AEFE.

Si rien n’indique effectivement que ces deux entorses aux règles comptables par l’AEFE se sont produites dans les lycées marocains relevant de l’Agence, il n’en demeure pas moins que le doute reste permis, surtout que les parents contestent la décision de ponctionner 2,6 millions d’euros du fonds...

de réserve du seul pôle de Rabat pour répondre au besoin de financement international de l’AEFE.

Les parents contestent également les décisions jugées unilatérales d’augmentations régulières  des frais de scolarité de leurs enfants. Dans un courrier adressé à la directrice de l’Agence, les parents dénoncent cet unilatéralisme, reconnu de facto dans la réponse qu’ils ont reçue de la concernée et qui explique que, en gros, « nous allons continuer d’augmenter les frais, mais en vous en avisant préalablement ».

Paiements directs en France, est-ce légal ?

« Je vous rappelle que les titulaires d’un compte bancaire en euros hors Maroc ont la possibilité d'effectuer un virement en euro sur le compte Trésor Public (TGE) du lycée Descartes sous le RIB suivant… », annonce le comptable aux parents d’élèves, en date du 26 janvier 2016.

Nous avons contacté aussi bien l’Office des Changes qu’un expert comptable marocain. La réponse est identique et formelle : « Il n’est pas prévu dans la circulaire de l’Office concernant les comptes de Marocains à l’étranger de payer la scolarité de leurs enfants au Maroc par le débit, en euros, de leurs comptes ouverts à l’étranger ». L’expert ajoute que celui qui paierait dans ces conditions serait en infraction à la législation des changes au Maroc et celui qui recevrait ce paiement serait « receleur » d’infraction à ladite législation.

Si un tel paiement est effectué par un Marocain, il serait donc en fraude par rapport à la législation marocaine en vigueur. Contactée par PanoraPost, l’agence comptable du lycée Descartes nous a affirmé ne pas être informée de la législation de l’Office des Changes et que ce courrier sera rectifié pour les prochains envois. Le principe de bonne foi peut être appliqué…

Mais cela dénote d’un manque de communication entre l’administration de l’AEFE, dont la directrice reconnaît dans son courrier adressé aux associations de parents d’élèves « une erreur de communication » et « demande aux services concernés d’assurer une meilleure information à (leur) égard ».

Le problème des relations entre les associations et l’Agence est récurrent depuis plusieurs années car, qu’il y ait ou non communication, les premières dénoncent régulièrement les décisions unilatérales prises par la seconde à leur égard, commençant par des augmentations d’année en année des frais de scolarité et s’achevant sur cette ponction de 2,6 millions d’euros effectuée sur le fonds de réserve du pôle Rabat-Kenitra.

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