Quand un marchand ambulant est piétiné, puis enchaîné, par des agents publics sur la voie publique… (vidéos)

Quand un marchand ambulant est piétiné, puis enchaîné, par des agents publics sur la voie publique… (vidéos)

Mardi 21 juillet, 10 heures, Mohammedia, près de la gare routière… un marchand ambulant, vendeur de figues de barbarie (lhandia) est pris à partie par deux auxiliaires d’autorité, ou moqaddems, tabassé, piétiné et entravé par une lourde chaîne et deux cadenas, en attendant l’arrivée des forces de police pour son incarcération. Il aura fallu un mouvement de foule pour le sauver…

La scène se passe de commentaires, et la colère des gens ayant assisté au tabassage du marchand est éloquente. Le vendeur de figues officiait à son habitude, quand des moqaddems (et non des policiers) sont arrivés et ont commencé à bousculer son voisin. L’un d’eux a dit aux autres de ne pas inquiéter ce dernier et de s’en prendre à celui d’à côté.

Coups de poings, gifles… l’homme est à terre, et les deux auxiliaires le piétinent, partout sur son corps, tête comprise. Puis ils l’entravent à sa charrette avec une chaîne et deux cadenas. Lorsque les passants sont intervenus, les moqaddems ont expliqué que le vendeur avait brandi un couteau pour se défendre, mais pour l’un des témoins, « le couteau est un outil de travail de cet homme, il est donc tout à fait normal qu’il en ait eu un en mains ».

Face au mouvement de foule et à la grogne, des responsables sont arrivés sur place et ont contribué à baisser la tension. L’homme à terre, inconscient, a été conduit à l’hôpital puis, interviewé par nos confrères de Kifach, a expliqué qu’il avait perdu connaissance et que ce n’est qu’une fois réveillé que les gens lui ont relaté ce qui s’est passé. « Ils m’ont frappé, m’ont piétiné comme un chien, parce que je ne voulais pas leur donner l’argent qu’ils réclamaient. Je vais maintenant déposer plainte auprès du procureur du Roi, et j'ai tous les témoins nécessaires », raconte le vendeur qui a quitté l’hôpital avec un certificat médical lui accordant deux semaines d’arrêt de travail.

Un journaliste d’al Ahdath al Maghribiya a contacté les services du 2nd arrondissement qui


« ont catégoriquement nié que le vendeur ait été frappé, piétiné ou enchaîné… mais on nous a confirmé qu’un moqaddem a appelé deux de ses collègues sans autorisation de l’autorité locale, et qu’il est aujourd’hui suspendu en attendant qu’il soit déféré devant le conseil de discipline de la préfecture de Mohammedia ».

« Nié catégoriquement »… fort bien, donc les images sont truquées et les témoins ont, tous, menti. On se demande bien pourquoi, et pour quelle raison aussi le passer devant le conseil de discipline ?

Selon le quotidien al Massae qui a également rapporté l'information et qui a interrogé des responsables de la préfecture de Mohammedia, le vendeur est un individu "marginal, qui a un casier judiciaire et qui a tenté de fuir, ne répondant pas à l'interpellation des moqaddems". Est-ce une raison pour l'enchaîner et le piétinier ? N'est-il pas un citoyen qui, quand bien même il aurait un casier judiciaire, bénéficie de droits ? 

Ces dernières semaines, la société dite civile s’enflamme pour un homosexuel lynché, pour deux jeunes femmes elles aussi exposées à la vindicte de la foule, pour une adolescente portant short dans un souk de Safi et invectivée… Tout cela aurait un sens si la même société civile s’intéressait également à ce genre d’exactions d’agents (auxiliaires ou officiels) vivant dans un autre temps et usant de mœurs qu’on croyait révolues, mais qui ne le sont pas toujours. La société civile, pour ne pas perdre sa crédibilité, dans les deux camps en opposition et qui s’affrontent par faits divers interposés, avec leurs armées d’internautes, serait grandie en pointant tous ces dérapages et en suivant ces affaires jusque dans les salles de tribunaux.

Saluons au passage l’action du caïd qui est intervenu et a mis un terme à cette grave atteinte des droits de l’Homme, ainsi que celle des agents (et officier) de police) que l’on voit sur la vidéo et qui ne sont pas intervenus pour disperser l’attroupement, se contentant de faire la circulation, et laissant les gens exprimer leur colère.

AAB

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